Les poèmes issus des mots sauvés : co-écrire de la poésie en thérapie narrative

De Wiki Pratiques Narratives
Aller à : navigation, rechercher

Rescued Speech Poems: Co-authoring Poetry in Narrative Therapy by Christopher Behan


Traduction de Fabrice Aimetti. Autorisation demandée à David Espton, le 9 août 2019.


Dans mon travail avec les personnes qui me consultent, je recherche toujours le langage poétique. J'écris sur un bloc-notes sur mes genoux les mots et les expressions qui font ressortir des images brillantes de la vie et de l'imagination de la personne, ou qui dépeignent des désirs et des rêves colorés, ou qui parlent d'une manière ou d'une autre d'initiatives extraordinaires. Johnella Bird (2000) appelle cela "des paroles qui chantent". Lynn Hoffman (2002) appelle cela "le langage peint". J'appelle ça un discours poétique.


Sur la page, ces notes, fragments de nos conversations, ressemblent presque à des poèmes : des morceaux de pensée continue, des impressions, mêlées de contradictions - avec beaucoup d'espace entre eux. Récemment, il m'est venu à l'esprit d'essayer de partager des versions éditées de mes notes sous forme de poésie avec certains de mes clients, de la même manière que je propose des lettres pour prolonger l'histoire entre les séances. Cette idée m'a plu parce que la poésie est plus à même de contenir certaines des complexités de la parole et de la richesse des histoires de ceux qui me consultent.


Je suis constamment frustré d'essayer d'exprimer en prose la profondeur et l'enchevêtrement de la vie de mes clients. Un ami bouddhiste m'a récemment offert un aphorisme qui décrit bien la difficulté : "Les langues du Bouddha sont trop maladroites pour décrire l'illumination." Les poèmes évoquent l'association, la rêverie et la contradiction. La poésie a un "espace entre" pour décrire la multiplicité, le caractère provisoire et l'ambiguïté et est peut-être mieux adaptée pour rendre visible ces histoires subtiles des conversations thérapeutiques.


Le fait de co-écrire de la poésie avec des clients correspond aux aspirations de la thérapie narrative d'être une "thérapie de valeur/qualité littéraire" (Epston & White, 1990). Michael White souligne les raisons importantes et pratiques de documenter nos conversations par écrit : "ces pratiques de l'écrit documentent les événements les plus étincelants de la vie des gens et, ce faisant, contribuent à "sauver ce qui a été dit à partir du moment où ça a été dit" (rescuing the said from the saying of it), "ce qui a été raconté à partir du moment où ça a été raconté" (the told from the telling of it). (2000, p.6). La conversation, en tant que moyen de guérison, peut avoir plus d'impact lorsqu'elle est enregistrée sous une forme poétique et projeter dans l'avenir.


Je crains qu'en appelant cela une pratique d'écriture poétique, il puisse y avoir un certain danger à juger ces documents en fonction de normes académiques ou esthétiques élevées. Peut-être qu'un "professeur dont l'anglais est la langue maternelle" incitera les clients ou les thérapeutes à censurer leurs propres mots ou à considérer ces efforts comme "moins que des poèmes". L'intention n'est pas nécessairement d'écrire le meilleur poème mais de sauver le discours poétique. C'est pourquoi je préfère les appeler "des poèmes issus des mots sauvés", un genre alternatif qui ressemble à la prose à bien des égards, mais qui offre l'espace et la liberté d'une poésie ouverte.


Ce court article reflète les débuts de mes explorations identitaires poétiques avec quelques unes des personnes qui me consultent. J'offre des exemples de certains des travaux et des lignes directrices initiales pour la co-écriture de poèmes avec des clients.


Notes

Erreur de référence : La balise <ref> définie dans <references> a un groupe attribué «  » qui ne figure pas dans le texte précédent.


Références

Bachelard, G. (1964). The poetics of space. (M. Jolas, Trans.). New York: Orion Press.


Bird, J. (2000). The heart’s narrative. Auckland, New Zealand: Edge Press.


Denborough, D. (2000). Living positive lives: A gathering of people living with HIV and workers in the HIV sector. Dulwich Centre Journal, 4, 3-37.


Freedman, J., & Combs, G. (2001, February). Bringing forth the poetry in “little sacraments of daily existence”. Paper presented at the International Narrative Therapy and Community Work Conference, Adelaide, Australia.


Hoffman, L. (2002). Family therapy: An intimate history. New York: W. W. Norton.


MacNeil, C. (2000). The prose and cons of poetic representation in evaluation reporting. American Journal of Evaluation, 21 (3), 359-367.


Rilke, R. M. (1934). Letters to young poet. (M. D. H. Norton, Trans.). New York: W. W. Norton .


Speedy, J. (2003, July). Using “poetic” documents in narrative therapy. Paper presented at the International Narrative Therapy and Community Work Conference, Liverpool, England.


Strand, M., & Boland, E. (2000). The making of a poem: A Norton anthology of poetic forms. New York: Norton.


White, M. (2000). Reflections on narrative therapy. Adelaide, Australia: Dulwich Centre Publications.